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Carte blanche à Gaël Favier

La chapelle Notre-Dame de la Santé

au pied du pont Vieux
- Localiser sur un plan

Dès le haut Moyen-âge, il n’est pas rare de rencontrer à proximité des hospices et hôpitaux érigés à l’entrée des villes une chapelle dédiée à la Vierge ou à un saint guérisseur (saint Roch, saint Sébastien, etc.) ; lieu qui permettait aux familles de confier leurs malades à la providence divine et qui pouvait également servir de chapelle funéraire. Ces édifices bénéficiaient souvent des largesses de familles aisées et de la reconnaissance des malades guéris.

Au bout du Pont-Vieux de Carcassonne, à l’entrée de la rue des Trois-Couronnes, s’élève une chapelle médiévale connue sous le nom de Notre-Dame de la Santé, que l’on l’appelait également Notre- Dame du Bout-du-Pont. En effet, le petit édicule est proche de l’ancien hôpital des malades. Dès le milieu du XVème siècle, le sanctuaire où les fidèles se pressent pour demander la guérison d’un de leur proche est jugée trop petit. En 1497, Pierre Jauffre lègue une importante somme pour la construction d’une chapelle. Quelques décennies plus tard, en 1527, Jean Saix offre 4000 livres pour agrandir l’hôpital des pestiférés et le sanctuaire. S’y pressent les malades mais également les fidèles de la ville et du bourg à l’occasion des fêtes mariales, en particulier le 25 mars, jour de la fête de l’Annonciation.

Malgré sa construction en pleine Renaissance, l’édicule est de style gothique flamboyant ; il succède à une chapelle édifiée à la fin du XIIème siècle par Raymond Roger IV, vicomte de Carcassonne, comme sanctuaire votif après avoir réussi à construire un pont sur l’Aude à cet emplacement. La modeste chapelle a toujours résisté aux inondations fort importantes en ce lieu. Avec l’accroissement de la ville et de ses faubourgs, la chapelle placée entre la ville basse et la Cité abrite une statue de Notre-Dame du Pont de l’Aude qui protège les deux agglomérations. 

La chapelle conserve sa configuration, au XVIIIème siècle vient s’adjoindre une sacristie ; elle est alors affectée à la confrérie de Notre-Dame du Boutdu- Pont. La vaste place qui s’étendait devant l’édifice appelée champ de manoeuvre permettait aux confrères de se réunir en nombre. En 1783, est construite la chapelle de l’hôpital général de l’autre côté du pont et dont subsiste la façade, elle pâtira de cette proximité. Désaffectée en 1793, elle subit les outrages de la spoliation ; ses statues, ses ornements et ses lampes votives d’argent disparaissent. Sur le tympan, les nouveaux propriétaires gravent « Magasin de l’hôpital de la Fraternité ». Un plancher est posé et elle est surélevée d’un étage.

Ce changement de destination sauve le bâtiment de la destruction. Il faut attendre 1857 pour qu’elle soit rendue au culte catholique et devienne un lieu de pèlerinage qui accueille les prières de familles des malades. L’évêque d’alors, Mgr de La Bouillerie, la rachète pour 5 000 francs, réalise des travaux dans un style néogothique pour lui redonner son allure et vient y célébrer solennellement une messe pour la fête de l’Immaculée conception, le 8 décembre. De nouveaux vitraux aux armes de l’évêque, d’un de ses prédécesseurs, Mgr Bazin de Bezons et de la famille d’Harcourt sont posés. Deux statues de Vierge à l’enfant sont installées ; une en plâtre polychrome dans le goût de Viollet-le- Duc disposée dans le choeur et une seconde, en 1875, à l’extérieur dans une niche gothique heureusement préservée.

La statue miraculeuse de Notre-Dame du Pont en pierre polychrome est entourée d’ex-voto et installée dans une niche à droite de la nef et date du XVIème siècle. Elle a été sauvée des affres révolutionnaires par une habitante de la Trivalle.

Le sanctuaire a conservé sa destination initiale ; un lieu de prière pour les malades et les habitants en difficulté. Cette dévotion est attestée par de nombreux ex-voto qui selon la mode de l’époque se traduisent par une plaque de marbre gravée. Ce qui n’empêche pas les familles modestes d’écrire à même le mur leurs prières et leurs reconnaissances. De nos jours, cette pratique se poursuit sur différents supports témoignant de la vitalité de la foi à Carcassonne. Elle est classée au titre des Monuments Historiques le 29 décembre 1932.

Gaël Favier (Conservateur du musée Notre-Dame de l’Abbaye Expert en objet d’art et art religieux )

Chiffres clés

  • 1497 : Construction de la Chapelle
  • 1932 : La Chapelle est classée au titre des Monuments Historiques